Rendement de l’enseignement postsecondaire au Canada : l’argent ne fait pas le bonheur
Selon un nouveau rapport publié par le Conseil ontarien de la qualité de l’enseignement supérieur (COQES), le niveau de financement des universités du Canada ne permet pas de prédire leur rendement. En effet, dans son analyse la plus récente et exhaustive des systèmes d’enseignement postsecondaire du Canada, le COQES constate que l’Ontario et la Nouvelle Écosse affichent le meilleur rendement dans l’ensemble malgré des coûts de fonctionnement inférieurs par étudiant, tandis que d’autres provinces qui investissent autant – ou dans certains cas beaucoup plus — obtiennent un rendement dans la moyenne ou inférieur à celle ci
D’après Harvey P. Weingarten, président directeur général du COQES : « Il n’est plus seulement question de savoir quelles sont les sommes affectées à l’enseignement postsecondaire : il faut se demander comment cet argent est dépensé et quels sont les résultats qui sont obtenus ».
Description du projet
Le rapport Incidence du rendement de l’enseignement postsecondaire au Canada en 2015 étudie les résultats des systèmes d’enseignement postsecondaire provinciaux en fonction de trois dimensions et de 34 indicateurs. Les indicateurs d’accès englobent l’accès général et équitable à l’enseignement supérieur; les indicateurs de valeur pour les étudiants comprennent l’expérience vécue par les étudiants, l’abordabilité et les résultats d’apprentissage; les indicateurs de valeur pour la sociétéincluent la création d’emplois, l’innovation et la participation des citoyens. Les résultats sont pris en compte relativement aux coûts de fonctionnement par étudiant, ce qui donne une cote de rendement globale pour chaque province. Bien que le rapport traite de l’enseignement dans les universités, les collèges et les métiers, le lien entre les coûts de fonctionnement et le rendement n’est examiné que dans le cas des systèmes d’enseignement universitaire, parce qu’il n’existe pas de données comparables à l’échelle nationale relativement aux collèges et aux métiers.
« Le rapport ne vise pas à désigner des gagnants ou des perdants, de dire M. Weingarten. L’objectif de ce rapport consiste en l’amélioration et son plus grand mérite est de déceler les points forts, les points à améliorer, de même que certaines voies à emprunter dans les systèmes des provinces ». Le rapport comporte également un outil Web interactif au moyen duquel les utilisateurs choisissent des indicateurs puis prêtent attention aux résultats les plus significatifs pour leur province ou leurs intérêts en particulier afin de constater dans quelle mesure les résultats pourraient s’en trouver recalibrés.
Étudiez les données de plus près au postsecondaryperformance.ca.
Rendement de l’enseignement postsecondaire au Canada
Globalement, l’enseignement postsecondaire au Canada donne de bons résultats. Dans chaque province, l’enseignement postsecondaire a une incidence positive quant à la réussite sur le marché du travail, aux revenus personnels, à la participation des citoyens et à la contribution à l’économie.
L’échelle du rendement global entre les provinces est relativement étroite : si celles ci n’échouent pas à ce chapitre, aucune n’est au dessus du lot.
Constatations propres à l’Ontario
Comme l’a également révélé le rapport sur le rendement de 2013-2014 du COQES, l’Ontario réussit très bien dans pratiquement tous les indicateurs relatifs à l’accès, mais plus particulièrement la participation aux études postsecondaires (le nombre de participants) et l’obtention de diplômes s’y rapportant (les adultes ayant un diplôme d’études postsecondaires).
Les constatations liées à l’accès mettent en évidence l’efficacité de la formule de financement en Ontario fondée sur l’effectif depuis 15 ans. Or, en matière de financement, il faut recentrer les priorités en fonction de la qualité plutôt que de l’effectif, suivant ce qui est relevé dans un rapport du COQES paru en 2013 à propos des présentations d’ententes stratégiques de mandat du secteur postsecondaire.
Dans l’ensemble, le plus grand handicap de l’Ontario au chapitre du rendement se rapporte aux indicateurs les plus pertinents pour les étudiants, mais des améliorations peuvent être apportées sans qu’il n’en coûte davantage. Par exemple, c’est en Ontario que les droits de scolarité affichés sont les plus élevés au Canada; toutefois, il en coûte nettement moins à la plupart des étudiants grâce aux programmes de subventions, de bourses, de crédits d’impôt et de réductions gouvernementales. Comme il est mentionné dans le rapport, le niveau d’endettement des étudiants ontariens figure parmi les plus bas au Canada trois ans après la fin de leurs études. Le gouvernement provincial doit bien informer les étudiants quant au véritable coût de leur scolarisation. L’avantage que présentent les investissements massifs en vue de l’abordabilité des études postsecondaires ressortirait bien davantage si l’information et les processus en lien avec l’accès aux programmes en question étaient remaniés et simplifiés, de façon à ce que les étudiants comprennent bien les coûts nets de l’enseignement supérieur… sans qu’il n’en coûte davantage au gouvernement!
En outre, le ratio personnel enseignant/étudiants de l’Ontario est le plus élevé au Canada. La création de postes supplémentaires en enseignement n’a pas constitué une priorité de financement gouvernemental, mais une recherche antérieure du COQES a révélé que si les professeurs qui ne sont pas actifs dans le domaine de la recherche enseignaient davantage, la capacité des professeurs à temps plein des universités de l’Ontario pourrait augmenter jusqu’à 10 %, ce qui reviendrait à ajouter 1 500 membres au corps professoral de la province… sans qu’il n’en coûte davantage non plus!
Entre autres constatations, c’est en Ontario que le taux de réussite des écoles de métiers est le plus bas au Canada. Dans le cadre d’une récente conférence du COQES sur les apprentis et les métiers spécialisés, il est apparu que ceux ci n’étaient présentés ni en tant qu’options attrayantes, ni à titre d’options où l’accès est facile.
Si l’Ontario s’en tire bien dans l’ensemble en ce qui touche les effets positifs apportés à la société, elle révèle toutefois le pourcentage le plus faible de diplômés qui occupent un emploi lié à leur champ d’études. La question suivante se pose : dans quelle mesure le système d’enseignement supérieur de l’Ontario est il adapté aux besoins du marché du travail à l’échelle provinciale? Le COQES est un ardent prometteur des résultats d’apprentissage : mesurer si les étudiants ont acquis les connaissances et compétences nécessaires pour réussir. L’Ontario aura l’occasion de faire preuve de leadership à l’échelle mondiale si elle s’engage à mesurer de tels résultats d’apprentissage de façon approfondie et à l’échelle du système, et à faire en sorte que ces résultats soient élaborés pour répondre aux besoins du marché du travail.
Les carences dans les données empêchent les comparaisons entre provinces
Le rapport permet également de déceler d’importantes carences dans les données, lesquelles empêchent d’établir des comparaisons entre les provinces sur le rendement des systèmes d’enseignement postsecondaire. La collaboration entre les gouvernements fédéral et provincial pourrait permettre de dégager un consensus à l’échelle canadienne sur un ensemble de statistiques de base ainsi qu’une norme de collecte de données, notamment en ce qui touche le secteur collégial.
Les auteurs du rapport Incidence du rendement de l’enseignement postsecondaire au Canada en 2015 sont Harvey P. Weingarten, Martin Hicks, Linda Jonker, Carrie Smith et Hillary Arnold. Deux stagiaires du COQES, Jeremy Henderson et Emily Michailidis, y ont également contribué.