Voici le premier d’une série de blogues sur les priorités de recherche du Conseil ontarien de la qualité de l’enseignement supérieur (COQES), où il sera question de différents enjeux, des facteurs associés et de perspectives d’avenir.
Il est déterminant, surtout dans l’optique des résultats d’apprentissage, d’accorder la priorité à la qualité en raison de son influence sur la façon de concevoir, d’exécuter, d’évaluer et d’améliorer les programmes d’études postsecondaires et les systèmes d’attribution de titres aux étudiants.
L’urgence d’accorder la priorité à la qualité est évidente, car la qualité détermine la valeur, la réputation et la compétitivité d’un système, d’un établissement ou d’un programme postsecondaire. Mais surtout, la qualité de l’éducation que reçoivent les étudiants a une incidence sur la perception de leur compétence et compétitivité.
On demande de plus en plus aux gouvernements de rendre compte de l’utilisation de l’argent des contribuables. Les étudiants et le public se demandent s’ils obtiennent un rendement optimal des fonds investis dans l’éducation supérieure. Les employeurs s’inquiètent de l’employabilité des diplômés qui accèdent au marché du travail, dans un contexte où on entend de plus en plus que les étudiants des collèges et universités n’acquièrent pas les compétences requises pour répondre à la demande et aux exigences des emplois actuels.
De nombreuses informations anecdotiques circulent, mais la preuve est claire. Les dernières données sur la littératie provenant de l’Enquête internationale sur l’alphabétisation des adultes (EIAA), de l’Enquête sur la littératie et les compétences des adultes (ELCA), du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) et du Programme pour l’évaluation internationale des compétences des adultes (PEICA) dégagent un constat décevant au sujet des compétences essentielles en littératie en Ontario. Comme constaté dans un rapport du COQES l’automne dernier, les étudiants qui entreprennent des études postsecondaires n’ont peut-être pas les compétences voulues en littératie pour réussir sur le marché du travail très compétitif et de plus en plus mondialisé.
Les compétences en numératie sont encore plus inquiétantes. Même si les données du PEICA révèlent que les compétences en littératie des Canadiens se situent près de la moyenne de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), les compétences en numératie sont de beaucoup inférieures à la moyenne de l’OCDE. De plus, la dernière enquête du PEICA a conclu que le rendement en mathématiques des élèves canadiens de 15 ans a diminué au cours des neuf dernières années.
Maintenant plus que jamais, on ne peut plus s’en tenir à de simples affirmations ou hypothèses au sujet de la qualité de l’éducation postsecondaire. Il faut plutôt que les établissements démontrent clairement que leurs programmes d’études ajoutent de la valeur et atteignent un niveau de qualité qui répond aux besoins professionnels et personnels des diplômés.
L’Ontario a déjà accompli des progrès considérables dans la détermination des résultats d’apprentissage. Le ministère de la Formation et des Collèges et Universités (MFCU) a été l’un des premiers à adopter les cadres de qualification – un système de résultats d’apprentissage attendus selon les titres de compétences. Les collèges et universités intègrent maintenant les résultats d’apprentissage dans les normes des programmes provinciaux et l’Ontario a participé activement au projet d’évaluation des résultats d’apprentissage postsecondaire de l’OCDE. Ce projet visait à mesurer ce que les étudiants en dernière année d’université savent et ce qu’ils peuvent faire, et comment ils se comparent aux étudiants d’autres pays. Le COQES a aussi collaboré avec les collèges et universités de l’Ontario pour définir et mesurer les résultats d’apprentissage dans des disciplines particulières, notamment les sciences de la vie et de la santé, les sciences sociales et les sciences physiques.
Un consensus global s’est dégagé, à savoir qu’on doit maintenant se concentrer sur l’évaluation des aptitudes d’apprentissage et cognitives générales. Il s’agit de compétences essentielles fondamentales : la lecture, l’écriture, la communication, la compréhension et l’utilisation des chiffres. Viennent ensuite les compétences essentielles de niveau supérieur, telles que la résolution de problèmes et la pensée critique. On n’est toujours pas parvenu à un consensus au sujet de la méthode à employer pour mesurer ces compétences, bien qu’on s’y emploie avec un consortium de collèges et d’universités de l’Ontario. Le Collège Durham, le Collège George Brown, le Collège Humber, l’Université Queen’s, l’Université de Guelph et l’Université de Toronto ont pris l’engagement d’évaluer ces compétences fondamentales, bien qu’il faudra près d’un an avant de produire des résultats prometteurs et plusieurs autres années afin de déterminer la variabilité par rapport à d’autres établissements d’enseignement postsecondaire de l’Ontario.
Du fait de la participation continue du Canada au PEICA, nous sommes déjà parvenus à un consensus sur l’évaluation de la littératie et de la numératie générales. D’ici un an, le système d’éducation postsecondaire de l’Ontario pourrait être un chef de file mondial s’il prenait l’engagement d’évaluer, à l’échelle du système, les compétences essentielles fondamentales des étudiants en se fondant sur des données, afin d’améliorer le rendement de ces derniers et la qualité dans les établissements. En utilisant ou en adaptant les données du PEICA, les collèges et universités de l’Ontario pourraient mesurer les compétences en littératie de tous les entrants et finissants à titre de première étape cruciale dans l’évaluation globale de l’atteinte des résultats d’apprentissage souhaités.
L’évaluation des résultats d’apprentissage est un exercice visant l’amélioration constante de la qualité et non l’imposition de pénalités. C’est une façon d’améliorer l’éducation et de déterminer les aspects efficaces et les aspects à corriger. En mesurant les résultats d’apprentissage cruciaux, les établissements d’enseignement postsecondaire contribueraient nettement à cerner les domaines à rectifier et documenteraient explicitement leur conséquence à valeur ajoutée, à savoir l’acquisition des compétences fondamentales qui favorisent la réussite professionnelle et personnelle. La mesure principale n’est pas le niveau absolu de ces compétences. En effet, on s’attend à ce que le rendement des étudiants dans différents établissements varie en fonction de leurs politiques d’admission, populations cibles et autres variables. La mesure cruciale est l’amélioration de l’ensemble de compétences des étudiants, soit depuis leur entrée dans l’établissement jusqu’à la fin de leurs études.
La priorité accordée aux résultats d’apprentissage montrera clairement la valeur ajoutée de nos établissements d’enseignement postsecondaire. Ce qui importe cependant, c’est que cela permettra également de moderniser le système d’enseignement postsecondaire de l’Ontario, du fait que la connaissance, les compétences et les aptitudes seront priorisées au lieu des cours et des heures-crédits. De plus, les systèmes de reconnaissance des crédits et les décisions seront fondés sur des preuves au lieu d’être arbitraires; les classements ne seront plus axés sur la richesse, la sélectivité et l’intensité de la recherche mais bien sur la valeur ajoutée de l’éducation; et le financement des établissements ne sera plus fonction du nombre d’inscriptions mais du rendement. Ces changements positionneraient le système d’enseignement postsecondaire public de l’Ontario comme l’un des plus modernes et progressifs au monde.
L’Ontario est un chef de file incontesté de l’accès à l’éducation postsecondaire. La qualité constitue le prochain objectif à atteindre et l’Ontario est en mesure de prendre les devants dans ce dossier. Les résultats d’apprentissage sont désormais un élément clé du lexique de la qualité, au même titre que les mesures de la qualité qui sont un élément clé du nouveau cadre stratégique de différenciation du MFCU. L’Ontario a amorcé ce virage, alors que les étudiants, les parents, les employeurs et les contribuables demandent des preuves claires et concrètes de la valeur ajoutée de l’éducation postsecondaire. C’est maintenant qu’il faut agir, car il n’est plus suffisant de simplement affirmer que l’Ontario est doté d’un excellent système d’éducation supérieure.
Nous vous remercions d’avoir lu cet article.
-Harvey P. Weingarten