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Création d’un « outil de prédiction de l’obtention des diplômes » universitaires

Une étude récente présente une approche qui pourrait faciliter la définition par le personnel des universités des moments et des contextes dans lesquels intervenir pour venir en aide aux étudiants. En prenant exemple sur la recherche concernant l’enseignement de la maternelle à la 12e année (depuis longtemps, les spécialistes de ce domaine étudient les prédicteurs de la réussite en général), les auteurs de cette étude montrent que la MPC et les crédits obtenus par les étudiants au cours de leur première année d’études, et les modalités de leur entrée à l’université (directement ou indirectement depuis le secondaire), ont une relation importante avec l’obtention du diplôme.

Auteurs : Rob Brown et Gillian Parekh


Les transitions dans la vie scolaire et les parcours universitaires ont une influence déterminante sur la vie des étudiants. C’est ce que confirment trente ans de recherche sur l’enseignement public en Ontario (page en lien en anglais seulement).

Les points principaux des transitions effectuées par les étudiants comprennent l’entrée dans les systèmes d’enseignement primaire et secondaire, ainsi que dans l’enseignement postsecondaire et dans la population active. Chaque point de transition est important. Toutefois, les occasions présentées aux étudiants tout au long de leur parcours d’études ont aussi un effet cumulatif, ce qui découle souvent sur des résultats stratifiés.

La recherche sur l’enseignement de la maternelle à la 12e année établit de nombreux prédicteurs en lien avec la réussite universitaire globale des élèves. Par exemple, des études démontrent que la combinaison d’un placement en classe d’enseignement spécial, de suspensions et de l’absentéisme peut avoir des effets néfastes sur les chances des élèves d’accéder à l’enseignement postsecondaire (en anglais seulement). À l’inverse, la participation des élèves du secondaire à des parcours universitaires, à des programmes spécialisés et d’enseignement spécial est étroitement corrélée à l’obtention d’un diplôme du secondaire et à l’accès à l’enseignement postsecondaire. L’accumulation de crédits en 9e année s’est avérée un prédicteur de l’obtention d’un diplôme d’études secondaires depuis plus d’une génération (page en lien en anglais seulement). La compréhension de ces relations fondamentales contribue à l’évaluation par les responsables des circonscriptions scolaires à évaluer les conditions d’enseignements sous l’angle de l’histoire des politiques et des pratiques, puis à créer des possibilités d’intervention au besoin.

Des chercheurs d’un conseil scolaire et d’une université du Sud de l’Ontario se sont efforcés de répondre à la question suivante : que se passerait-il si des universités pouvaient, comme les chercheurs qui étudient le système scolaire de la maternelle à la 12e année l’ont fait, créer un outil pour faciliter la compréhension des meilleurs moments et des contextes appropriés pour aider les étudiants à obtenir leur diplôme?

Ce projet de recherche concerté a observé plus de 11 000 étudiants qui :
a) étaient entrés en 9e année dans un conseil scolaire de grande taille en zone urbaine entre 2003 et 2007;
b) avaient effectué la transition vers l’université. La plupart d’entre eux (61 %) avaient effectué une transition directe de l’enseignement secondaire à l’université. Les 39 % restants avaient effectué une transition indirecte (c.-à-d. qu’ils étaient arrivés d’un autre établissement postsecondaire, ou qu’un laps de temps s’était écoulé entre l’obtention de leur diplôme d’enseignement secondaire et leur arrivée à l’université).

Nous avons axé cette étude sur trois facteurs : la MPC de la première session des étudiants, l’accumulation de crédits à la fin de leur première année et les modalités de leur entrée à l’université (directe ou indirecte depuis l’enseignement secondaire). Nous avons établi que trois facteurs étaient importants. On observe une corrélation importante entre la MPC de la première année à l’université et l’obtention du diplôme; la plupart des étudiants qui ont une MPC de 4 (une note de C) au minimum ont obtenu leur diplôme. La probabilité d’obtenir un diplôme pour les étudiants dont la MPC était de 3 (soit la note de D) était moindre. De la même façon, il était probable que les étudiants qui avaient obtenu 15 crédits ou plus (remarque : une charge de cours complète de septembre à avril correspond à 30 crédits) obtiennent leur diplôme. La probabilité pour les étudiants entrés directement à l’université d’obtenir leur diplôme était nettement supérieure à celle des étudiants entrés indirectement.

Notre examen précédent des modalités d’entrée à l’université des étudiants (directe ou indirecte) a révélé des tendances significatives en ce qui concerne l’accès et d’autres types de privilèges (Parekh, Brown et James, 2020). Dans le cadre de notre étude, les étudiants entrés à l’université directement :

  1. s’identifiaient le plus souvent comme des femmes,
  2. étaient le plus souvent nés au Canada,
  3. avaient le plus souvent accès à deux parents,
  4. avaient le plus souvent suivi des cours de niveau universitaire en 9e année,
  5. avaient suivi des programmes d’enseignement spécial à une fréquence inférieure à celle de leurs pairs entrés à l’université de façon indirecte.

Par exemple, la figure 1 ci-dessous présente la corrélation entre le genre, le parcours, l’accès et l’obtention d’un diplôme universitaire. On observe un écart de 20 % entre les hommes et les femmes entrés directement. Cet écart est de 27 % entre les étudiants de sexe masculin entrés à l’université de façon indirecte et les étudiantes entrées directement. Ces chiffres suggèrent que l’identité des élèves, ainsi que la façon dont les élèves font la transition à partir de la 12e année, peuvent façonner (ou influencer) les parcours et résultats postsecondaires.

Aux fins d’élaboration d’un outil de prédiction de l’obtention du diplôme, nous avons combiné la MPC de la première année des étudiants au nombre de crédits qu’ils avaient obtenus. Nous avons aussi examiné les modalités d’arrivée à l’université depuis l’enseignement secondaire : directe ou indirecte.

Pour les personnes entrées directement, une MPC de C ou supérieure et l’accumulation d’au moins 15 crédits est un prédicteur moins précis (bien qu’encore puissant) de l’obtention du diplôme (80 %). Pour les étudiants entrés à l’université indirectement, une MPC de C ou supérieure et l’accumulation d’au moins 15 crédits est un prédicteur moins significatif d’obtention du diplôme (fréquence d’obtention du diplôme de 67 % contre 80 %).[1] Les étudiants qui avaient obtenu moins de 15 crédits ou une MPC inférieure (de 3 ou moins) au cours de leur première année avaient peu de chance d’obtenir leur diplôme, qu’ils soient entrés à l’université directement ou indirectement (les deux groupes obtenaient un diplôme à une fréquence de 28 % environ). De plus, il était nettement moins probable que les étudiants entrés à l’université de façon indirecte aient une MPC plus élevée que leurs pairs entrés directement ou qu’ils aient accumulé un nombre plus élevé de crédits.

Bien que l’on puisse penser que ces facteurs permettent de mesurer la réussite ou la détermination individuelle en matière d’enseignement uniquement, ils peuvent aussi indiquer les conditions et les possibilités offertes aux étudiants lors de leur parcours d’études.

L’arrivée à l’université est une transition clé, et tous les étudiants n’ont pas eu accès aux mêmes expériences pour les préparer à cette phase de leur vie. Toutefois, les universités peuvent mettre en œuvre certaines stratégies pour venir en aide aux étudiants. Par exemple, si la MPC et l’accumulation de crédits lors de la première année sont des facteurs critiques pour l’obtention du diplôme, les universités peuvent envisager d’autres interventions pour venir en aide directement aux étudiants lors de leurs premières années d’études.

De plus, si les modalités d’entrée d’un étudiant constituent un autre prédicteur important de l’obtention d’un diplôme universitaire, les universités peuvent aussi envisager les rôles et responsabilités multiples des étudiants, dans leur vie universitaire comme à l’extérieur. Voici certaines questions importantes pour le personnel des universités.

  • Comment les universités pourraient-elles offrir davantage de possibilités aux étudiants de développer leurs compétences d’étude et leurs stratégies d’apprentissage, en particulier au cours de leur première année d’études ?
  • Est-ce que les cours offerts à l’université intègrent des méthodes de pédagogie inclusive et ménagent des points d’entrée dans le curriculum pour tous les étudiants ?
  • Comment les programmes peuvent-ils intégrer la flexibilité et les aménagements pour soutenir les élèves qui peuvent avoir de multiples rôles et responsabilités en dehors de l’école (par exemple, des rôles de soins, un emploi, etc.) ?

Les études offrent une approche pratique au personnel des universités : elle peut servir à examiner la population étudiante de chaque établissement, ainsi que les conditions dans lesquelles on demande aux étudiants d’apprendre. Par conséquent, les établissements peuvent être plus réactives pour venir en aide aux étudiants dans le cadre de leur transition vers le monde de l’enseignement postsecondaire.


Notes

[1] Cette fréquence inférieure d’obtention du diplôme chez les étudiants à risque faible pourrait être expliquée en partie par le fait que certains étudiants entrés indirectement étaient des étudiants de cycle supérieur entrés à l’université après des études de premier cycle ailleurs. Ces étudiants pourraient ne pas avoir eu le temps d’achever des programmes de cycle supérieur plus long.

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