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Ken Chatoor – Recherche supplémentaire requise sur les apprenties et apprentis de l’Ontario

La pandémie de COVID-19 a eu un impact profond sur les populations du monde entier, et l’Ontario ne fait pas exception à la règle. Bien que certains aient pu travailler à domicile, d’autres ont perdu leur emploi en grand nombre : le taux de chômage de la province a plus que doublé, passant de 5,5 % en février à 13,6 % en mai. Alors que nous continuons à vivre en période de pandémie et, espérons-le, à amorcer la reprise, il est évident que le retour à la normale ne sera pas rapide.

Avec le dépôt du budget provincial, le gouvernement de l’Ontario s’est engagé à aider les gens à se recycler et à améliorer leurs compétences par l’entremise de microcertifications, de services d’emploi et de programmes de formation qui comprennent des apprentissages. L’annonce du budget comprenait la Stratégie relative aux métiers spécialisés, qui vise à moderniser le système des métiers spécialisés et de l’apprentissage de l’Ontario en effaçant les stigmates, en simplifiant le système et en favorisant la participation des employeurs.

En dépit du fait qu’il s’agit d’un élément essentiel du système d’études postsecondaires de l’Ontario, la formation en apprentissage est mal comprise, même au sein du secteur. En outre, elle est souvent négligée lorsque l’on pense à des parcours de carrière viables et lucratifs pour les étudiantes et étudiants de l’Ontario. Dans ce contexte, le COQES a effectué des recherches afin de mieux comprendre le monde des apprentis en Ontario. Plonger dans les détails des données de Statistique Canada sur les apprentis a révélé beaucoup de choses sur ce secteur crucial du système d’éducation et de formation de l’Ontario.

Ce que nous avons principalement retenu, c’est que si nous souhaitons apporter des améliorations importantes au système d’apprentissage – qu’il s’agisse de l’accès ou de l’achèvement – une approche programme par programme est essentielle. Notre travail souligne également le fait que les métiers peuvent offrir des parcours de carrière bien rémunérés et recherchés qui correspondent à ceux de nombreux programmes d’études collégiales et universitaires et même les dépassent. Cela soulève la question de savoir pourquoi le système d’apprentissage n’est pas inclus plus souvent dans les discussions sur le système postsecondaire et s’il est possible que cela change à la lumière des récentes initiatives du gouvernement.

De nombreuses nouvelles questions ont émergé de notre travail. Voici trois des questions les plus urgentes que nous avons retenues après avoir examiné nos conclusions et le discours plus large sur les métiers ayant lieu au sein du gouvernement :

  • Pourquoi les taux d’achèvement sont-ils si différents? Les taux d’achèvement varient considérablement d’un programme à l’autre.  Les apprentis ont fait état d’une foule de difficultés précises qui pourraient les empêcher de terminer leur programme. De nombreux anciens apprentis exercent leur métier même s’ils n’ont pas terminé leur programme, et il est important de noter que certains déclarent des revenus comparables à ceux de leurs homologues qui ont terminé leur programme. Comprendre comment les difficultés rencontrées par les apprentis affectent leur capacité à terminer leur programme ou leur volonté de le faire pourrait mener à un changement positif.
  • Sommes-nous confrontés à une pénurie imminente de travailleurs spécialisés? Le vieillissement de la main-d’œuvre dans les métiers a fait l’objet de nombreux débats publics. S’il est vrai que certains métiers sont fortement dominés par les travailleurs âgés, les inquiétudes concernant une future pénurie de gens de métier peuvent également s’inscrire dans le cadre de changements plus larges de l’économie de l’Ontario. Les études futures sur les pénuries de main-d’œuvre dans les métiers devraient examiner comment les tendances en matière d’inscriptions, l’avenir du travail, le vieillissement et même les industries régionales affectent notre perception de cette question. 
  • Qui accède aux emplois dans les métiers et comment l’accès pourrait-il être amélioré? Il existe un déséquilibre et une sous-représentation importants de certains groupes démographiques dans les métiers. C’est particulièrement vrai pour les femmes et les minorités visibles. Comprendre pourquoi l’accès reste un problème dans certains métiers pourrait guider les efforts futurs de recrutement et être la clé pour encourager un plus vaste segment de la population ontarienne à faire carrière dans les métiers.

Les données que nous avons utilisées, issues du recensement du Canada, de l’Étude longitudinale et internationale des adultes et de l’Enquête nationale auprès des apprentis, ont été recueillies avant la pandémie de COVID-19. Nous ne pouvons donc pas encore savoir comment ces résultats seront affectés par les perturbations liées à la pandémie. Bon nombre des enjeux qui touchent les collèges et les universités, comme la fermeture de lieux de travail et le passage à l’apprentissage en ligne, ont également affecté les programmes d’apprentissage. Les premières indications issues de Statistique Canada sont très troublantes pour les apprentissages et les métiers spécialisés. Par exemple, 53 % des étudiants des programmes de métiers spécialisés ont déclaré que certains cours avaient été annulés ou reportés au printemps, soit plus du double du nombre d’étudiants des programmes de sciences, de lettres, d’éducation ou de droit. En outre, 13 % des étudiants des programmes de métiers spécialisés ont déclaré ne pas pouvoir terminer leurs cours lorsqu’ils sont passés en ligne, soit plus que dans tout autre domaine d’études. À la lumière des pertes d’emplois subies pendant cette pandémie et des défis auxquels sont confrontés les apprentis actuels, l’urgence de ces premières constatations ne peut être sous-estimée.

Alors que de plus en plus de personnes poursuivent leur apprentissage tout au long de la vie, se reconvertissent ou développent leurs compétences pour répondre aux exigences d’un marché du travail en rapide évolution, nous devons veiller à ce que tous les éléments de notre système d’éducation et de formation, y compris l’apprentissage, soient pleinement soutenus.

Ken Chatoor est chercheur principal au Conseil ontarien de la qualité de l’enseignement supérieur.

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