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Robert H. Seidman – Programmes d’études de trois ans axés sur les compétences et l’évaluation

Robert H. Seidman, professeur émérite de la Southern New Hampshire University

L’enseignement postsecondaire aux États‑Unis a franchi un seuil critique. Le coût des études supérieures a atteint un sommet sans précédent, et beaucoup d’étudiants prometteurs ne peuvent aspirer à un avenir prospère. De plus, le pays court le risque de perdre des talents essentiels. De nombreux États réduisent les fonds qu’ils versent aux collèges et universités, d’où la hausse des droits de scolarité. Beaucoup d’établissements postsecondaires dont le financement dépend des droits de scolarité ne parviennent pas à atteindre leur quota d’inscriptions, et certains sont au bord de la ruine.

Certes, des efforts incessants sont faits pour innover et améliorer la qualité de l’enseignement supérieur, comme l’ont souligné Barry Fishman et Caitlin Holman de l’Université du Michigan dans un récent blogue du Conseil ontarien de la qualité de l’enseignement supérieur (COQES). Mais quels sont les avantages d’une qualité supérieure pour un étudiant qui n’a pas les moyens d’acquitter les frais de scolarité? Existe-t-il une solution miracle pour sortir l’enseignement supérieur de la fâcheuse spirale des droits et des coûts, qui menace l’existence de nombreux établissements principalement financés par les droits de scolarité et empêche l’admission d’étudiants brillants mais défavorisés sur le plan économique? Il est possible de l’espérer.

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Voix de la conférence des 23 et 24 mars 2016 du COQES – Transitions : L’apprentissage par-delà les frontières, les secteurs et les cloisonnements

Mon travail au cours des 20 dernières années a porté sur la restructuration de l’enseignement supérieur pour le rendre plus abordable, notamment en diminuant de 25 % les droits payés par les étudiants ainsi que les frais d’exploitation des établissements par un taux similaire. Il est possible de le faire en retranchant une année des programmes de quatre ans, sans cependant diminuer leur portée ou qualité pédagogique. Ce travail est exposé dans mon récent ouvrage, corédigé avec Martin J. Bradley et Steven R. Painchaud. L’aspect fondamental de cette solution est les programmes axés sur les compétences et l’évaluation, où le temps en classe n’est plus associé aux heures-crédits et où les expériences éducatives hors classe sont pleinement intégrées aux programmes. Ainsi, l’enseignement postsecondaire est mieux en mesure de répondre aux besoins tant des étudiants que de la société.

La transformation d’un programme menant à un grade en quatre ans en un programme intégré axé sur les compétences de trois ans comporte la restructuration des modalités afin d’éliminer le contenu redondant et les dédoublements, tout en préservant la qualité et l’intégrité éducatives. Chaque sujet d’un cours du programme de quatre ans est analysé séparément, puis remanié et intégré à des « modules » du cadre axé sur les compétences. Les nouveaux modules d’enseignement et les expériences d’apprentissage associées sont élaborés et échelonnés dans un souci d’efficacité, ainsi que les résultats attendus, les stratégies d’évaluation et les approches d’enseignement et d’apprentissage.

Est-il facile de le faire? Non. Il faut consacrer du temps, des efforts et collaborer avec le personnel enseignant et les administrateurs. Vaut-il la peine de le faire? La Southern New Hampshire University (SNHU) croit que oui. En 1997, son école d’études commerciales offrait un seul programme intégré axé sur les compétences de trois ans sur le campus, alors qu’actuellement, ses 13 programmes de spécialisation en administration sont de trois ans. De nombreux étudiants qui veulent économiser s’inscrivent aux programmes de trois ans, qui suscitent aussi l’intérêt des employeurs qui recherchent des diplômés possédant des compétences spécialisées. Les étudiants acquièrent 120 crédits pendant six semestres dans les cours sur campus, sans relâche estivale ou entre les sessions, dont 30 crédits hors des classes. Ce sont les expériences éducatives extérieures qui permettent aux établissements de réduire leurs frais d’exploitation.

College for America (CfA) de la SNHU est un modèle spécialisé d’application de l’enseignement en ligne axé sur les compétences, où les étudiants mettent en pratique leurs connaissances au lieu de s’initier seulement à de nouvelles matières. Les étudiants démontrent leur maîtrise des compétences dans des activités réalistes basées sur des scénarios, appelées projets. Ces projets sont créés à l’interne par une équipe de spécialistes en conception et évaluation de programmes.

Dans le CfA, les heures-crédits ne sont plus fonction des heures passées en classe. Les étudiants apprennent à leur propre rythme et bénéficient d’interactions constantes avec des mentors qui appuient leur progression, ainsi qu’avec des spécialistes qui évaluent leur travail. Les étudiants bénéficient d’occasions multiples de présenter leur travail et de recevoir une rétroaction, puis de revoir leur travail et ainsi de suite. Ils soutiennent aussi leurs condisciples dans une communauté d’apprenants qui poursuit le même programme d’études.

Le programme entièrement agréé coûte seulement 2 500 $ par année, et les étudiants sont admissibles à l’aide financière « Federal Title IV ». Le barème de droits diffère de celui des programmes sur campus. Les établissements réduisent leurs coûts parce qu’ils n’ont pas à verser de salaire à des professeurs à temps plein ordinaires et économisent sur les ressources de soutien qui aident les étudiants à acquérir les 120 compétences requises. De plus, les partenaires du modèle CfA n’engagent pas de frais de recrutement d’étudiants, car ces derniers viennent d’employeurs privés. Les premiers résultats sont très prometteurs.

Mon intention n’est pas d’insinuer que les innovations de la SNHU constituent une panacée pour les études postsecondaires. Mais pour beaucoup d’étudiants qui ne peuvent payer les droits de scolarité, un programme CfA de trois ans peut faire la différence entre un diplôme d’études secondaires et un grade universitaire. N’est-il pas temps que les établissements d’enseignement supérieur offrent des programmes abordables et accessibles au grand nombre de familles et d’étudiants aux moyens limités?

 Robert H. Seidman est professeur émérite de la Southern New Hampshire University.

À notre avis, les blogueuses et blogueurs invités expriment leurs propres avis, et pas nécessairement ceux du COQES.

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