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Sarah Brumwell – Résilience, compétences transférables et enseignement supérieur

Sarah Brumwell, chercheuse au COQES

L’un des conférenciers d’honneur du COQES dans le cadre de la conférence Transitions, Paul Tough, signe un excellent  article expliquant comment les enfants apprennent à être résilients dans le numéro de juin de la revue The Atlantic. C’est terrain connu pour lui puisque son livre à succès intitulé How Children Succeed explique en quoi des qualités comme la persévérance, la curiosité et le contrôle de soi ont autant d’importance pour la réussite des enfants que leurs habiletés scolaires. L’article de Tough dans The Atlantic est fascinant puisqu’il aborde une question qui alimente la discussion depuis que How Children Succeed et que l’étude d’Angela Duckworth sur le cran ont attiré l’attention des éducatrices et éducateurs. Comme le demande Paul Tough : « Le paradigme de l’enseignement est-il le bon à utiliser quand on veut aider les jeunes à acquérir des compétences non cognitives? »

La question de Paul Tough est au cœur d’un drame qui se propage au sein du secteur de la maternelle à la 12e année, surtout aux États-Unis. Le secteur postsecondaire devrait surveiller ce débat. Tout comme le développement du caractère fait référence aux qualités non scolastiques qui peuvent aider un enfant à réussir, des compétences transférables comme la détermination, le sens de l’initiative et le travail d’équipe s’avèrent essentielles à la réussite en milieu de travail. À mesure que les collèges et universités déploient des efforts pour préparer leurs diplômés à intégrer le marché du travail, ces compétences suscitent de plus en plus d’intérêt.  Mais parce que les compétences transférables sont intimement liées à la personnalité, elles posent des défis uniques au niveau de l’approche axée sur les résultats d’apprentissage.

Le grand défi consiste à déterminer si ces compétences peuvent ou non être enseignées et évaluées de façon fiable dans le cadre d’un cours ou d’un programme postsecondaire. La résilience, par exemple, est influencée par une gamme de facteurs internes et externes, y compris les expériences dans la petite enfance, la personnalité, les réseaux de soutien et les stratégies d’adaptation. Puisque la résilience est multidimensionnelle, elle se développe de façon imprévisible à intervalles imprévisibles.  Et comme l’indiquent les résultats de l’étude nationale de Wabash, les facteurs qui influencent le développement des compétences transférables peuvent être très nuancés quand les élèves atteignent le stade des études postsecondaires. Les influences démographiques et socioculturelles jouent un plus grand rôle dans les perceptions que les élèves ont d’eux-mêmes et du monde qui les entoure, au point où des élèves avec certaines expériences peuvent réagir positivement à des stratégies d’enseignement qui n’ont aucun effet discernable sur d’autres. Si des compétences transférables comme la résilience sont si profondément individuelles, que peut faire le secteur postsecondaire pour déterminer des résultats et des attentes en matière de développement?

Comme mentionné dans le récent rapport du COQES intitulé La mesure de la résilience à titre de résultat de l’éducation, le caractère pluridimensionnel de la résilience est difficile à évaluer à l’aide d’une seule mesure ou d’un seul barème. C’est pourquoi les éducatrices et éducateurs pourraient avoir avantage à mettre l’accent sur ses diverses composantes. À titre d’exemple, un contexte éducatif encourageant peut constituer une source de force extérieure pour les élèves. D’autres composantes, comme des stratégies d’adaptation, peuvent être enseignées et perfectionnées à l’aide de programmes d’aide ciblés. La résilience ne constitue peut-être pas un résultat pédagogique en soi, mais il est clair que les éducatrices et éducateurs peuvent s’en servir pour fournir aux élèves les pierres d’assise requises pour améliorer leur réflexion adaptative et leurs schémas de comportement.

Pour en revenir à la question de Paul Tough, certaines compétences non cognitives conviennent mieux que d’autres au contexte éducatif. La résilience, en particulier, pourrait être trop intimement liée à la personnalité et aux expériences de vie pour que les établissements puissent s’attendre à une croissance démontrable au fil d’un cours ou d’un programme. Cela ne signifie pas pour autant que la résilience et autres compétences transférables sont hors de portée de l’éducation postsecondaire, mais plutôt que nous en avons encore beaucoup à apprendre sur comment aider nos élèves à réussir.

Sarah Brumwell est chercheure au COQES.

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