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Terry Gitersos – Terry Gitersos a un emploi (et on avait bel et bien conservé son CV)

Photo de Terry Gitersos

Blogueur invité : Terry Gitersos

Des personnes bien intentionnées au COQES m’ont demandé de rédiger un épilogue aux missives que j’ai écrites le printemps dernier à propos de mes mésaventures sur le marché du travail en tant que détenteur de fraîche date d’un doctorat. Je résumerai cette histoire au long cours en vous disant que j’ai finalement déniché un emploi, et que j’en suis à mon quatrième mois de travail pour le compte d’une entité indépendante du gouvernement de l’Ontario.

À cette étape-ci, on s’attend peut-être à ce que je raconte une histoire inspirante qui rassurera les personnes surscolarisées et sous-employées, comme quoi ces dernières finiront bien par trouver à leur tour un emploi rédempteur et satisfaisant si elles persévèrent dans leurs recherches. Le hic, c’est que ça ne s’est pas vraiment passé comme ça dans mon cas. En réalité, l’obtention de mon emploi s’est faite tout à fait par hasard.

Il s’en est fallu de très peu que j’abandonne définitivement mes recherches d’emploi. Vers la fin de 2012, j’étais sans emploi depuis 16 mois et totalement convaincu que j’étais incapable d’en obtenir un. Même les agences d’aide temporaire rejetaient ma candidature : j’avais fait parvenir mon CV à une douzaine d’entre elles, mais seulement une a communiqué avec moi pour me donner rendez-vous, et la plupart ont repoussé ma candidature d’emblée (je ne savais même pas que cela était possible). En outre, j’en avais vraiment assez des recherches d’emploi, devenues une corvée, et du sentiment d’échec qui s’ensuivait presque inévitablement.

Que ce soit en raison des CV qui, par douzaines, disparaissaient chaque semaine sans qu’il n’y ait de suites données, des entrevues qui ne menaient nulle part, ou de mon compte bancaire qui était en épuisement perpétuel, j’avais l’impression que toutes ces démarches causaient un préjudice considérable à ma santé mentale. Je me suis alors donné pour objectif de trouver un emploi avant Noël; si rien ne s’était concrétisé d’ici là, je reprendrais les études. Autrement, j’allais devenir manœuvre bénévole dans une ferme biologique, m’inscrire comme professeur d’anglais en république de Géorgie, reprendre contact avec l’un de mes meilleurs amis au Guatemala pour tenter de joindre les deux bouts à titre d’expatrié du Nord, ou fuir pour faire partie d’une troupe de cirque. N’importe quoi. Tout, sauf le statu quo.

Alors que je ne m’y attendais plus, mon employeur actuel  a communiqué avec moi le 20 décembre, c’est à dire l’avant dernier jour ouvrable avant le délai de Noël que je m’étais imposé, afin de m’offrir un poste pour lequel je n’avais ni posé ma candidature, ni même vu l’annonce. Au cours de l’été, cet employeur m’avait convoqué en entrevue – sans succès – relativement à un tout autre poste; à l’évidence, j’ai dû lui faire bonne impression puisqu’il avait conservé mon CV dans ses dossiers. Le lendemain, j’ai passé des examens de français langue seconde, à l’oral et à l’écrit, puis on m’a convoqué en entrevue au début de 2013. À la fin de la première semaine de janvier, je m’étais trouvé un emploi.

Le sentiment le plus vif que j’ai éprouvé à la signature de mon contrat, c’est du soulagement. Bien entendu, j’avais envisagé plein d’autres options éventuelles sur le plan professionnel, mais c’était surtout en désespoir de cause et parce que je sentais que je n’aurais peut-être pas le choix au bout du compte; à court terme, je préférais très certainement intégrer le marché du travail et commencer à économiser le plus tôt possible. Je pense avoir également ressenti du bonheur, pour autant que le bonheur se définisse par le fait de ne plus devoir chercher un emploi.

L’endroit où j’aillais être embauché m’importait alors très peu. Cela étant, j’ai eu – et j’insiste sur ce point – beaucoup de chance de me trouver une très bonne position; avec réalisme, il s’agit de la meilleure position possible que j’aurais pu espérer à la fin de 2012. En milieu de travail, j’adore mes collègues de même que le milieu (relativement) décontracté, où je me sens appuyé. Nos clients sont gentils et s’emportent rarement contre nous. De plus, je souscris en grande partie à l’énoncé de mission de l’organisation.

Cependant, tout n’est pas parfait. D’abord, le salaire versé aux débutants n’est pas exceptionnel; disons tout simplement que ma rétribution se situe bien en deçà du salaire moyen que touchent les détenteurs d’un doctorat. Ensuite, ma sécurité d’emploi laisse beaucoup à désirer : j’ai signé un contrat d’un an, et il semble que l’organisation prévoit supprimer mon poste complètement à la fin de 2013. En outre, fait troublant pour moi, je ne fais pas pleinement appel aux compétences fondamentales (notamment la recherche, l’analyse, la rédaction et la prise de la parole en public) acquises durant mes études au doctorat. On peut dire avec réalisme que l’exécution satisfaisante des tâches liées à mon emploi ne nécessite pas un diplôme universitaire; d’ailleurs, j’occupais un poste très semblable au sein d’une organisation très semblable dans ma ville natale avant d’obtenir mon grade de baccalauréat.

Mais je m’inquièterai de cet état de choses en temps et lieu. Je prévois me remettre pleinement en mode panique sur mon avenir à long terme d’ici les semaines ou les mois à venir; c’est tout simplement dans ma nature. D’ici là, je me permets de jouir de ma bonne fortune; pour l’instant, je ne demande pas mieux que de travailler avec des collègues que j’apprécie, au sein d’un milieu agréable, et d’être rétribué à intervalles réguliers.

-Terry Gitersos

À notre avis, les blogueuses et blogueurs invités expriment leurs propres avis, et pas nécessairement ceux du COQES.

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