Une des statistiques les plus surprenantes que j’ai vues depuis mon arrivée au COQES l’an dernier est qu’environ 50 % des étudiants admissibles à une aide financière ne présentent pas de demande, alors qu’ils recevraient une partie des fonds sous forme de subventions qu’ils n’auraient pas à rembourser. Pourquoi renonceraient-ils à la possibilité d’obtenir de l’argent gratuit du gouvernement?
Cette statistique renforce mon opinion de longue date selon laquelle les débats politiques canadiens sur les droits de scolarité figurent parmi les plus anémiques au pays. Or, il est important de se doter de politiques sensées à ce sujet. Après tout, les coûts associés à une éducation supérieure sont un facteur très important dans la décision de faire des études postsecondaires.
Le problème est que beaucoup des discussions habituelles sur les droits de scolarité donnent une idée fausse de la réalité. Par exemple, contrairement à ce qu’affirment différents groupes de revendication, un récent rapport du COQES souligne qu’au Canada, les hausses des droits de scolarité enregistrées depuis une dizaine d’années n’ont pas entraîné une baisse du taux de participation aux études postsecondaires. Le rapport démontre également que l’inflation et les crédits d’impôt ont sensiblement atténué le coût réel de l’augmentation des droits de scolarité entre 1999-2000 et 2007-2008. De nombreux étudiants n’ont pas à payer la totalité des droits de scolarité grâce à l’éventail de programmes d’aide financière de l’Ontario. Malgré la hausse des droits, les étudiants ontariens affichent aujourd’hui des taux de défaut historiquement bas, et environ 46 % des étudiants d’université de l’Ontario n’ont aucune dette lorsqu’ils obtiennent leur diplôme.
Cependant, l’argument le plus important du rapport – et celui qui se rapproche le plus du sujet de ce blogue –, c’est qu’il est inapproprié et illogique de parler des droits de scolarité sans tenir compte du montant et de la nature de l’aide financière mise à la disposition des étudiants. C’est dans ce contexte que le grand nombre d’étudiants admissibles qui ne présentent pas de demande d’aide financière est troublant, vexant et inextricablement lié à ce qui pourrait être le problème le plus pressant dans le système d’enseignement postsecondaire du Canada : malgré un taux de participation généralement très élevé par rapport à d’autres pays de l’OCDE, certains groupes – particulièrement les familles à faible revenu, les Autochtones et les premières générations d’immigrants (dont les parents n’ont pas fait d’études postsecondaires) – sont sous-représentés dans les collèges et universités. L’ironie de la chose, c’est que les membres de ces groupes sont ceux qui bénéficieraient le plus d’une éducation postsecondaire.
Nous pensions jadis que ce problème de « sous-représentation » était relativement facile à régler : il suffirait de fournir toute l’aide financière nécessaire à ces étudiants pour qu’ils puissent aller au collège ou à l’université. Les recherches effectuées montrent toutefois que mettre plus d’argent sur la table est une solution nécessaire mais insuffisante. Dans bien des cas, la décision de faire des études postsecondaires se prend tôt dans la vie, et cette décision peut se fonder sur des informations ou des perceptions financières erronées. Il existe une foule de facteurs socioculturels et attitudinaux qui rendent les membres des groupes sous-représentés réticents à faire des études supérieures et à demander une aide financière. Si nous voulons accroître leur taux de participation, nous devons nous efforcer de mieux comprendre ces facteurs et trouver des moyens plus efficaces de sensibiliser les étudiants aux réalités du financement des études postsecondaires. Nous devons notamment les aider à répondre aux questions suivantes : Quel est le coût réel d’une éducation postsecondaire? Combien d’argent puis-je obtenir? Combien est-ce que je devrai après avoir obtenu mon diplôme et est-ce qu’il sera facile de rembourser les prêts? Quels sont les avantages financiers associés à l’obtention d’un diplôme d’études postsecondaires?
Comme je l’ai appris, ces questions tombent sous la rubrique de la « littératie financière » (même après un an, il me reste encore du jargon à apprendre). Étant donné l’importance du problème de « sous-représentation » et le rôle central que la littératie financière jouera dans sa résolution, nous avons décidé d’organiser une conférence, qui se tiendra les 3 et 4 novembre 2011 au Toronto Delta Chelsea, au cours de laquelle d’éminents chercheurs pourront discuter de leur travail en littératie financière dans le domaine de l’éducation et des innovateurs pourront partager les stratégies élaborées pour faire connaître les programmes d’aide financière et en accroître le taux d’utilisation. La conférence comportera également une séance de discussion approfondie sur les prochaines mesures à prendre pour améliorer la littératie financière, particulièrement chez les membres des groupes traditionnellement sous-représentés. Notre rôle est d’amorcer la discussion. Notre objectif est d’aider à trouver de véritables solutions. Inscrivez la date dans votre calendrier, restez à l’écoute pour les détails qui suivront bientôt ou écrivez-nous si vous ne pouvez pas attendre.
Merci de votre attention.