Bien que nous soyons une étudiante et un diplômé récent d’un programme d’études postsecondaire, nous avouons avoir de la difficulté à décrire nos compétences et aptitudes. Et nous ne sommes pas des exceptions. Nous pouvons affirmer avec certitude que nous possédons de solides compétences en lecture et en rédaction, mais cela ne fait qu’effleurer la surface. Les compétences telles que la réflexion critique, la résolution de problèmes, les aptitudes à parler en public, la recherche et l’analyse des politiques sont des compétences sur lesquelles sont fondés nos travaux de défense des étudiants, tant à l’interne, à l’Université Queen’s, qu’à l’externe, par l’entremise de l’Ontario Undergraduate Student Alliance (OUSA).
De multiples critiques ont été émises au sein du secteur postsecondaire de l’Ontario, ce qui laisse supposer que les collèges et universités financés par les fonds publics ne permettent généralement pas aux étudiants d’acquérir les compétences dont ils ont besoin pour réussir sur le marché du travail et dans la société. Les critiques parlent d’une « lacunes en matière de compétences ». Les établissements d’enseignement ont rapidement réagi en commercialisant et en élargissant leurs programmes d’apprentissage intégré au travail, en renforçant leurs réseaux d’anciens étudiants et en soulignant leur taux d’emploi. Bien que ces réponses soient importantes pour réfuter le mythe des lacunes en matière de compétences au niveau abstrait, leurs répercussions ne sont pas ressenties là où elles devraient l’être, par les étudiants de niveau postsecondaire. C’est là que réside le problème plus général : Le secteur postsecondaire de l’Ontario présente une « des lacunes en matière de sensibilisation aux compétences ».
La sensibilisation des étudiants aux résultats d’apprentissage peut influer sur la qualité de l’enseignement d’un établissement et l’employabilité de ses diplômés. En termes simples, quel est l’intérêt d’apprendre quoi que ce soit si l’on ne peut pas décrire ce que l’on a appris? Dans ce scénario, vous n’avez en somme rien appris. C’est un fait que peu d’administrateurs des études postsecondaires et de membres du corps professoral ont accepté et mettent en œuvre, ce qui fait que la progression des pratiques d’évaluation des résultats de l’apprentissage a plutôt stagné dans l’ensemble du secteur.
Une partie du problème découle également de la diversité des approches que les établissements, les programmes d’études et les services de soutien ont adoptées pour aider les étudiants à comprendre leurs résultats d’apprentissage, à les évaluer, à y réfléchir et les décrire. Un document publié récemment par le Conseil ontarien de la qualité de l’enseignement supérieur, « Habiletés, compétences et titres d’études », décrit certaines de ces approches, qui comprennent les plans de cours, les attestations de bénévolat (AB) et les portefeuilles électroniques. Chaque approche distincte comporte des atouts et des lacunes, qui dépendent souvent de la rigueur dont on a fait preuve dans le cadre des méthodes d’évaluation.
Les plans de cours sont le moyen le plus commun de description des résultats d’apprentissage aux étudiants. Cette méthode est un moyen efficace de les présenter aux étudiants parce qu’elle est adaptée au cours et s’adresse à l’intégralité de la classe. Toutefois, l’efficacité de cet outil est entravée par le manque de réflexion des étudiants au sujet des résultats d’apprentissage énoncés. S’ils ne réfléchissent pas à ce qu’ils devaient apprendre et à la mesure dans laquelle cela correspond à ce qu’ils ont réellement appris, les étudiants ont de la difficulté à examiner collectivement leur parcours d’apprentissage dans le cadre d’un cours donné.
Les attestations de bénévolat (AB) sont une autre approche qui reconnaît que l’apprentissage des étudiants ne se limite pas à l’apprentissage en classe ou en salle de conférence. Les étudiants commentent d’ailleurs souvent que leurs expériences d’apprentissage les plus significatives ont lieu en dehors de la classe. Par conséquent, les AB constituent une tentative de cataloguer chacune de ces expériences dans un énoncé centralisé comportant une liste correspondante des résultats d’apprentissage. Certains permettent aux étudiants de saisir eux-mêmes les renseignements, y compris les résultats d’apprentissage, puis de les valider à l’interne pour en assurer la cohérence. D’autres disposent d’une liste préétablie dans laquelle les étudiants peuvent sélectionner des résultats. Toutefois, le niveau d’évaluation qui sous-tend la validation de ces expériences varie considérablement d’un AB à l’autre.
Les outils en ligne, notamment les portfolios électroniques, ont également aidé les étudiants à cataloguer les aptitudes et compétences qu’ils ont acquises au cours de leurs études postsecondaires, et à y réfléchir. Bien que l’élaboration de ces outils ait beaucoup de sens en théorie, cette pratique est entravée par un manque de responsabilisation et de validation.
En termes simples, il est temps d’abandonner le mythe des lacunes en matière de compétences et de combler plutôt les lacunes en matière de sensibilisation aux compétences. Jusqu’à ce que les plans de cours, les AB et les portefeuilles électroniques comprennent des résultats d’apprentissage scolaires et parascolaires et fassent partie d’une politique sectorielle assurant une norme de base des taxonomies, des positions, des expériences et des pratiques d’évaluation, les employeurs et les étudiants n’en comprendront pas la valeur.
Victoria Lewarne est étudiante en études politiques à l’Université Queen’s et commissaire aux affaires universitaires à l’Alma Mater Society. Elle est également membre du conseil d’administration de l’Ontario Undergraduate Student Alliance (OUSA).
Marc Gurrisi est analyste de la recherche et des politiques à l’Ontario Undergraduate Student Alliance (OUSA). Il est également ancien stagiaire en recherche au Conseil ontarien de la qualité de l’enseignement supérieur.